jeudi 6 novembre 2008

Dieudo au National

Il est revenu! Dieudo le rigolo, l’apôtre de la farce et du bon mot. Revenu faire le con à Montréal après une première cet été où il a fait salle comble soir sur soir au National. Revenu renforcer ses liens d’amitié avec non des moindres des enfants du Québec.

Le spectacle d’abord. De légères modifications par rapport à ce que l’on a pu voir cet été. Mais combien d’énergie ! Cet été, on était en droit de penser que Dieudo était sur la corde raide, terminant une carrière flamboyante sur des sketchs moyens et une mise en scène lourde.

La représentation que j’ai vue cette semaine démentissait totalement cette vision. Dieudo est à l’apogée de son art. Le tempo de la mise en scène est donné par l’acuité de son regard sur l’actualité et la précision de son ton. Bien entendu, il fait un retour sur le parrainnage de sa fille Plume par le plus sulfureux des politiciens français. Il raille l’empressement des médias à venir lui cracher à la gueule: Dieudo enculé. « C’est moi, l’enculé », dit-il avec un petit sourire coquin et sournois. Mais il n’avoue qu’à demi-mot: « Lançons la rumeur », se seraient-ils dit, Le Pen et lui-même, alors qu’il est avéré que le baptême a bien eu lieu. Dieudo brouille-t-il les pistes ? Ou n’assume-t-il qu’à demi son acte de provocation?

L’épisode sur le baptême de Plume mis à part, le spectacle est un régal à tous points de vue, avec un passage délirant sur les mensonge de l’administration Bush où l’on rit sans interruption. On y découvre un George Bush doutant des manœuvres criminelles auxquelles il se livre et encouragé par un baron de l’armement qui lui explique crûment qu’il faut faire tourner la machine guerrière pour faire de l’argent.

Pour une des rares fois dans sa carrière, Dieudonné affronte de front le problème de l’Afrique, notamment avec la question des Pygmées du Cameroun. S’ensuit d’ailleurs une diatribe délicieuse sur le politiquement correct où il faut distinguer un Pygmée des Pygmées, un Juif des Juifs, etc. Pour paraphraser Pierre Desproges, on pourrait dire que si il fallait peser ses mots au centigramme près à chaque fois que l’on devait en bailler une, on aurait plus le temps de chier tranquille.

L’apothéose du spectacle demeure incontestablement le final sur fond de tragédie gréco-palestinienne, comme Dieudo se plaît à l’appeler. On y retrouve Dieudo et son amour des mots, le Dieudonné poète et métronome des rimes, du rythme, et maître de la quintessence de la douleur humaine. On ne peut s’empêcher de tremebler à sa chanson, de sentir un frisson vous parcourir durant les multiples crescendos qui n’en finissent pas de vous anéantir.

En matière de conneries, que prépare Dieudonné pour la scène Québécoise ? En artiste consciencieux, il peaufine sa connaissance du dossier autochtone qui l’intéresse particulièrement, mais auquel il ne veut pas s’attaquer sans une compréhension forte. Aussi nous a-t-il confié qu’il préparait prochainement un voyage dans une réserve indienne. Quand on connaît la frilosité des Québécois sur le sujet, on peut s’attendre à ce que le taquin que cet humoriste s’est avéré être, saura nous en mettre plein la gueule. D’ici là, allez encourager le talent et allez rire avec ce Dieudonné qui nous fait rire intelligemment sans nous laisser le loisir de tourner en rond.

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